Vainement l'aïeule appela pour information.
La mère avait fait un carnage !
Après la pluie...le beau temps.
Le père prit la décision, pour améliorer les conditions de la vie familiale, de reprendre ses études. But : devenir officier de la marine marchande ; puisque sa femme l'avait empêché de faire carrière dans la Royale. Que d'années perdues !
La petite fille se glissa hors de sa paillasse. S'appuya sur la cloison. Pencha la tête pour voir son héros. Le père était courbé sur une boite vitrée, lumineuse, de sa fabrication, crééé pour la copie rapide de croquis énigmatiques d'énormes moteurs de machines...
Cette rentrée-là vit trois nouveautés.
Le père à l'école d'hydrographie des officiers.
Le Mistral ! Nanette n'aimait pas le Mistral. A cause de lui le temps méridional était glacial l'hiver. Pourtant les adultes l'appréciaient. Il chassait les nuages. Permettait un ciel clair. D'un bleu lumineux. Elle, pestait. Il fallait lutter pour garder les jupes sur ses jambles bleuies par le froid piquant. Les garçons avaient de la chance. Ils portaient des pantalons.
Elles attendirent plus d'une demi-heure, aux portes de la Basilique, avant que d'autres habitués ne prennent leur tour. Un quart d'heure avant l 'ouverture la queue atteignait la boulangerie installée à l'autre bout de la ruelle du port.
Les adultes étaient préoccupés. La Hongrie venait d'être envahie. La T.S.F. donnait de mauvaises nouvelles. Les mères de famile faisaient des provisions. Le sucre, le savon, l'huile, les pâtes, le riz et le café commençaient à manquer sur les étagères de l'épicière qui commençait à rationner ses clientes. Les jugeant peu raisonnables.
Le lendemaine la scoute mit toute sa force conviction pour que sa mère lui remette le sac contenant les restes de pelotes.
Un bruit d'averse torrentielle réveilla Nanette. La rue, très pentue, accentuait les effets sonores de l'eau. Que de courbatures ! Que de senteurs chaudes-fortes !
Rentrer à midi pour le déjeuner demandait une vive allure. Il y avait peu de temps. Souvent l'écolière aurait préféré déjeuner à la cantine. Pouvoir se reposer un peu avant la reprise des leçons, en jouant aux osselets avec ses copines, dans la cour. Mais elle devait rentrer en vitesse. Repartir de la même façon.
La grande, en riant aux éclats, rentra chez elle.
Nanette se demanda si elle était normale.
L'hiver n'en finissait pas...
Les dimanches sans sortie avec les Lions, la fillette se retrouvait seule avec le petit frère. Le père révisait ses cours chez un copain breton. Marié. Habitant un grand logement. Tous deux vétérans de la session devaient impérativement réussir ce concours.
Mars qui rit à travers les averses
Prépare en secret le printemps"
CHAMP D ' OLIVIERS
en Haute-Provence
(Peinture familiale)
La vacancière arriva essoufflée de sa première visite au cabanon.
- Tu as repassé mon costume, ma chemise blanche, ma cravate ?
- Driling ! Driling !...Alors, l'officier, on arrose ça !
Une nouvelle année commençait
La routine reprit. Plus sereine. Repas. Ecole. Cathéchisme.Scoutisme...Et les escales tant attendues du papa !
Si le Mistral ne gâchait pas l'après-midi en refroidissant trop l'air et en déstabilisant les marcheurs.
Toute vêtue de blanc, Nanette fit sa confirmation. Plus intimidée par le cadre majestueux de la Basilique, et le nombre d'élues, qu'émue.
Le père porta sa grande et lourde valise pendant plus de trois kilomètres ; avant d'utiliser quelques minutes le trolley qui conduisait du port aux pieds de la Bonne Mère. Quelques arrêts avant le terminus, il poursuivit son chemin sous la pluie.
- Eh bien ma grande ? Tu n'ouvres pas ?
- Pourquoi tu prends pas un taxi. Tu es tout mouillé. Presque bleu. Tu vas tomber malade...
Les escales étaient régulières. Nombreuses. Brèves : un jour.
- Tiens ma grande. Installe-toi.Ce n'est pas grand, mais maintenant j'ai une cabine personnelle et un bureau. Je reviendrai vers midi. Nous irons manger au carré.Enferme-toi. Ne fais pas de bruit. Ne réponds à personne. On sait où me trouver s'il y a quelque chose.
- Zut ! Papa, les voisines sont sur le seuil de la porte...
A l'escale suivante, il apprit que les mégères avaient porté plainte.
Mémé dormait de plus en plus longuement les après-midi.
Le frère, comme chaque été, était chez la grand-mère du nord ; afin que la mère se repose de son caractère turbulent.
L'année scolaire se déroula agréablement.
La maîtresse était très proche de ses élèves. Aimant les livres, elle ouvrait tous les jours la biblliothèque de la classe ; par ailleurs bien fournie en romans, poésies, fascicules.
La cérémonie se déroula sous un soleil radieux.
La foule des grands jours attendait à la sortie de l'office. Même ceux qui n'allaient jamais à l'église voulaient voir les enfants dans leurs habits de fête. Commentaient les tenues à la vue du cortège.
Bientôt tous se retrouvèrent dans la cuisine.
Au coude à coude. Des sardines en boite.
- Mémé ! Tiens, de la pièce montée. Je viens un peu avec toi. C'est bruyant en bas ! Il fait une de ces chaleurs !
Nanette descendit.
Ce fut avec surprise qu'elle vit chaque invité lui remettre un présent.
Grandiose !
C'était grandiose à plus d'un titre...
Des deux pièces de 32 m2, sans commodités, de la rue de la savonnerie, ils arrivaient au douzième et dernier étage d'un H.L.M. flambant nef. Parfumé aux plâtres et peintures qui sèchent.
Ah ! La première douche !
Douze ans passés. Indicible. Une nouvelle naissance ! Elle serait restée des heures à flotter dans la baignoire-sabot !
On inscrivit le petit au catéchisme ; pour qu'il reçoive les sacrements rituels.
- Tu habites la même rue que moi. On peut faire le chemin ensemble. Ca paraîtra moins long.
Grâce à l'ascenseur certaines familles firent connaissance.
Elle quitta l'ascenseur avec soulagement.
La porte se referma doucement.
Une foule de vieux, de vieilles, vêtus de noir, s'agglutinaient dans la rue.
Elle embrassa. Fut embrassée. Monta au plus vite dans sa chambre.
Les collégiennes se pressaient de rentrer pour avoir le temps de relire quelques leçons avant la composition trimesstrielle de l'après-midi.
Le lendemain, alors qu'elles sacrifiaient à leur course contre la montre de la mi-journée, en grimpant allégrement la méchante côte menant à leur quartier...
- Tu pourras venir à mon anniversaire samedi après-midi ? Dis ! Tu réponds ? Tu es sourde !
Le soir elle pensait à lui avant de s'endormir.
Peut-être était-ce mémé qui, du ciel, guidait cette rencontre.
- Maman, les guides organisent un camp volant en Corse, en juillet, je pourrai y aller ?
Elle n'avait pas dormi de la nuit. Après une semaine de préparatifs.
- Tu vas en Corse ?
- Euh...oui...c'est la destination du cargo.
- On voit rien !
- Tant pis. Faut monter les tentes. Vite se reposer. Demain nous monterons le camp.
Le projet fut un peu chamboulé par un feu de forêt qui survint le jour où le camp devait commencer son périple.
Heureuses de l'accueuil. Confuses pour le dérangement. Ventre calé... Elles reprirent leur chemin de piste, après maints remerciements, sous les yeux attendries des mémés, qui devaient critiquer, en patois, les responsables de leur famine...
Les cadeaux souvenirs pour la famille furent vite trouvés.
- Je t'ai déjà dit non. Plusieurs fois. N'insiste pas !
- J'ai fait ça pour toi. Pour la famille. Mais, tu m'as juré de t'occuper toujours de ta mère, et de ton frère...
- Tu viens d'où, si beau, pépé ?! Tu n'as pas chaud dans ton beau costume foncé...par ces chaleurs d'été !
Depuis la mort de l'aïeule la mère faisait assaut d'arguments pour obtenir le don de la bâtisse.
Vous venez de lire
les premières pages
d'une saga écrite en deux tomes.
- Toi !...mais que t'est-il arrivé ?!
- .........
- Tu parais vieillie de vingt ans !
Tel a toujours été
le COMBAT
de
NANETTE
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Souvent
- Vois-tu, lorsque j'ai préparé des concours administratifs,...
Ah ce stage !
Deux trimestres pendant lesquels mes collègues de promotion se sont moqués de moi, car, vieille croûte par rapport à eux, je bossais les interrogations que vous nous donniez tous les vendredis après-midi...tandis qu'eux s'organisaient pour des "pompes".
- Ah ce stage...
La tête des trois filles quand la première semaine, lors de l'élection pour désigner un président de promo, j'ai eu des voix, bien que n'étant pas candidate.
- Les choses auraient pu continuer ainsi...avec quelques incidents de parcours...
- Je t'épargnerai le détail des dix-sept mois qui suivirent...
- Enfin ! C'est le jeudi 3 novembre !
Je suis un peu inquiète...
- D'ailleurs,
n'ayant qu'un véhicule, pour cette première journée, mon mari, - qui ne travaille pas le lundi matin - m'ayant accompagnée, et, devant venir me reprendre vers midi...
- Enfin, le 10 novembre, vers midi, je reçois deux brèves phrases de mon supérieur hiérarchique direct. Autorisée à me présenter le mercredi 12.
- On aurait pu penser,
malgré l'impolitesse rare et la rudesse inexplicable du premier accueil,
- J'étais sidérée devant autant de méchanceté gratuite.
Mais je n'acceptais pas, (je n'accepte toujours pas !), que mon statut de contôleur, non de contrôleuse !, à part entière soit bafoué à ce point...
- Pauvre naïve idiote !
Je pensais arriver à convaincre ce misogyne (dans le travail seulement d'après ce que tu m'as confié), qu'une femme peut aussi bien contrôler les assujetis que le sexe dit fort !
- Tu connais ce responsable de région.
Pour ma part notre premier contact restera longtemps gravé dans ma mémoire...
- Puis-je me permettre de vous demander, Monsieur l'Inspecteur Divisionnaire, ce qu'il a été décidé en ce qui concerne mes horaires ?
- Permettez-moi d'ajouter,
Monsieur l'Inspecteur Divisionnaire,
Que penseras-tu si je te dis que j'étais ahurie par de tels propos ?
- Non.
Pour moi ces allégations émanaient de mauvais esprits.
- Je retournai donc m'asseoir derrière le vieux bureau, coincé dans un coin, qui m'avait été attribué.
- Pas instruite sur ces moeurs-là,
mais pas complètement stupide, j'ai compris qu'il fallait accorder du crédit à ses propos du premier jours.
- Ma première lettre de candidature fut renvoyée.
Je ne devais pas, parait-il, expliquer pourquoi je quémendais une autre affectation ...
- Ordre me fut donné de lui représenter mes Etats-de-Frais de déplacement.
- Mais dit...IL est tard !
- Ca ne fait rien ! Pour une fois que je te tiens. Que le hasard nous rapproche...continue !
- Conseil de guerre avait été tenu.
Le despote,
sous les directives du Grand Chef régional,
- Avec mon ridicule salaire, malgré les frais énormes déjà occasionnés par la situation du domicile familial, j'avançais prix du carburant et repas à l'Etat...
- Comment aurait-il procédé, s'il avait su que je possédais une preuve tangible de son illégale intimidation ?
- Neuf mois pendant lesquels on ignora totalement ma présence.
Dans mon esprit la Vie ne devait pas obligatoirement être simple, facile, mais tout individu :
- NAIVE !
J'ai oublié de te dire que malgré le blocus, un jour j'avais pu joindre le centre de formation...pour réclamer, discrètement, des stages de perfectionnement.
- Tu dois te souvenir que lors du stage j'arrivais toujours en avance sur l'horaire...Depuis toujours, j'ai la hantise d'arriver en retard à mon job...
- 9h 30 ...trois hommes jeunes, décontractés, poussent la porte au fond du couloir. Avancent en discutant...M'apercevant ils pressent le pas.
- Tu comprendras que ma première matinée dans la capitale me surprit. Mais, à vrai dire, tous manifestèrent une sympathie de bon ton, qui ne se démentit pas au cours des cinq jours qui suivirent.
Mon coeur fit mine de s'arrêter un instant. Puis redémarra en sens inverse. Puis repartit à nouveau dans le bon sens ...mais battant la chamade...
- Mi-octobre je reçois une fiche du divisionnaire que je sais par coeur :
- Rien.
Pas de vérification.
Projet de fiche de notation annuelle maintenu.
- Depuis l'annonce de cette sanction, tous les jours, pendant que mes collègues déjeunaient, j'avais établi des tableaux d'activités...
- Le bulletin trimestriel,
édité par le syndicat, mentionna laconiquement cet épisode...Notamment
- Me restait à préparer un recours administratif auprès du Tribunal compétent en n'omettant aucun des éléments qui avaient motivés réellement la punition :
- On voit, paraît-il, ce trait de caractère à mon Mars "dans la soupe" !
- D'abord, j'ai dû rencontrer la "tête" de notre syndicat.
- Je fis remarquer au syndicat, que pendant quatorze mois rien ne m'avait été reproché.
- Cela n'alla pas en s'améliorant.
Au contraire.
Maintenant je ne me défendais plus pour conserver mon dossier administratif inodore, contre deux chefs, mais tous !
- Une autre semaine qu'elle ne fut pas ma surprise !
- Vingt-cinq mois d'enfer.
Ajoutés aux quatorze déjà vécus, dans cette atmosphère...
- Le syndicat, peureux, progressivement, m'a lâchée..
- D'abord,
depuis ma visite au bureau syndical, j'adressais copie de tout mon travail, en réclamant renvoi du double signé...afin de prouver mon activité.
- Le 13 mai, je répliquais par lettre recommandée avec accusé de réception.
- Le 8 juin m'apporta un nouveau courrier des défenseurs des Droits de l'Homme et des travailleurs en démocratie responsable...
- Le 7 juillet 1982, je répondis par lettre recommandée avec accusé de réception.
REMERCIEMENTS
Vous avez échoué. Il n'empêche que, très sincèrement, je vous suis reconnaissante de cet essai d'action ; contre le courant établi qui veut que le syndicat soit (mes collègues me l'ont affirmé...me trouvant un peu naïve)
Mort en soldat à cause de la FRANCE
Ame certes élue,
Fier jeune homme si pur tombé plein d'espérance,
- Fin 1982, après 24 mois de tension, mes troubles "stress cardiaques" devenaient plus fréquents, longs, douloureux...
- Pendant cet arrêt, je reçois mon arrêté ; rien de plus normal !...
- Le 1er février 1983 je reprends mon poste.
Tous s'étonnent, je devais rentrer le 3 janvier.
- Tu t'en doutes je répliquai aussitôt par LR/AR !
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- Comme prévu...aucune réponse.
Le divorce était consommé après plus d'un an de mariage-alibi.
Revenons à mes malheurs.
J'en étais à trois recours administratifs, le temps s'écoulant imperturbablement. Deux concernant la notation annuelle. Un pour l'Arrêté rétroactif et ses graves conséquences.
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Lors d'une intervention télévisée vous avez notamment déclaré :
- Au fil des trsstes découvertes, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à l'illogisme grave de la situation :
- Volà la lettre. Lis.
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- Une nouvelle fois, changement de ministre.
Espérant qu'il interviendrait, afin qu'une solution rapide et équitable soit trouvée, je lui adressai un bref rapport, justifié par trente-deux pièces jointes.
- J'ai lu, dans une journal,
et c'est bien, - de le dire haut sur la place publique, - à mon sens,
- J'usais mon véhicule, pour consulter d'anciens agents sous les ordres de mon détracteur et obtenir leur témoignage écrit...
- Lors de l'affaire des "avions renifleurs" je pestais devant la télévision !!!
- Comment arriverons-nous un jour à leur venir fondamentalement en aide ?...
- Il faut être équitable.
Accorde nous que les contrôleurs sont mal lotis. Tout le cadre B.
- De plus, ils sont trop souvent considérés comme des larbins.
- Je ne leur en veux pas de ne m'avoir pas soutenue,
- Zut !...Tu as vu l'heure ?!
- Mince, nous sommes les derniers clients...